EDITORIAL de Laurent Chazelas, président
PRENDRE SOIN DE SOI.
Je me lève très souvent de bonne heure.
Et je me couche d’ordinaire bien tard.
Mes journées de travail sont plus que remplies.
Je ne chôme pas.
Je ne me ménage pas.
Pourtant, plus le temps file, plus je me sens débordé.
Je cours d’une école à une autre, d’une situation à une autre. J’ai réduit, faute de temps, les suivis individuels. Je réalise des bilans psychologiques bien moins étoffés. Je suis de moins en moins disponible pour rencontrer parents et enseignants. Des actions de prévention ? Une pratique de plus en plus difficile à tenir.
Que se passe-t-il ? Ne suis-je pas bien organisé ?
Voilà en quelques traits le vécu professionnel de plus en plus de collègues.
Le « burn out » voire le « brown out » gagne de plus en plus les psychologues de l’Éducation Nationale.
La quantité de travail est devenue très importante. Il y a une explosion de dossiers pour les MDPH, des participations accrues aux ESS qui, dans certains secteurs, phagocytent nos emplois du temps et ne permettent plus de voir les enfants. Ou si peu de temps. Certains éprouvent une perte de sens de leurs actions.
Nous qui nous préoccupons de la souffrance des autres, nous finissons par nous maltraiter. Et l’institution n’est pas innocente à cela.
La création du corps n’a pas tout réglé. Mais il serait facile, pour certains, de la rendre responsable de cet épuisement professionnel dont nous sommes tous plus ou moins victimes.
Il n’en est pourtant rien.
Après l’acquisition du statut, serions-nous victimes d’un petit moment de déprime, d’une forme de post-partum ? D’un idéal qui se confronte à la réalité ?
Ce n’est pas si simple.
Les facteurs de cette situation sont pluriels.
Les demandes ont explosé mais il n’y a pas eu de création de postes.
Les structures de soins pour les enfants sont saturées. Dans l’attente de soins, des enfants en souffrance mettent à mal l’institution et les enseignants.
On observe aussi une plus grande précarité sociale de nombreuses familles qui entraîne mal-être et difficultés scolaires.
L’école inclusive, si nous ne pouvons qu’y souscrire, fragilise enfants, familles et enseignants quand les conditions nécessaires ne suivent pas; ce qui crée des situations parfois de détresse en opposition aux valeurs humanistes que porte ce projet.
On assiste aussi, ici et là, à des tensions voir des rigidités avec certains supérieurs hiérarchiques qui voient dans la création du corps des psychologues leur autorité menacée.
Cette addition de facteurs rend à beaucoup d’entre nous l’exercice du métier plus difficile.
Si la création du corps des PSY-EN reste un pas de géant pour la reconnaissance de notre identité professionnelle au sein du système scolaire, il faut maintenant accompagner sa mise en œuvre.
L’AFPEN doit être ici un acteur majeur de cette évolution.
L’organisation de notre profession doit nous permettre de garantir un bon exercice du métier.
Vous le savez, les adhérents de l’AFPEN ont voté pour que des psychologues de type « conseillers techniques » soient présents auprès des DASEN, auprès des recteurs et au ministère pour favoriser ce bon exercice.
Cette organisation devra permettre aux psychologues un exercice conforme au code de déontologie signée par notre association en février 2012, dans le cadre d’un travail institutionnel et dont les intérêts supérieurs des enfants et des personnes demeurent une préoccupation primordiale.
La formation initiale et continue est un axe majeur et doit répondre aux besoins que nous avons. Elle est déterminante quant aux missions que nous avons à défendre.
C’est la raison pour laquelle l’AFPEN entreprend une rencontre avec l’ensemble des centres de formation pour échanger avec les stagiaires et les directrices et directeurs, pour participer à l’évaluation et l’évolution de la formation initiale. Ces rencontres sont fondamentales car s’élaborent dans ces espaces les représentations de la profession.
Nous sommes très vigilants pour que les psychologues de l’Éducation nationale ne deviennent pas, comme on a pu l’entendre récemment, de simples passeurs de recherches des laboratoires de psychologie cognitive. Si les psychologues que nous sommes doivent assurément être en lien et informés des recherches en cours, il nous semble important de conserver avant tout une approche clinique du sujet au sein de notre institution.
Apprendre ne va pas de soi et ne se résout pas uniquement en terme d’aménagement pédagogique ou de rééducation neurocognitive.
Dans la même démarche éthique, l’AFPEN participe à des groupes de réflexion où l’attention est portée à l’enfant dans une approche globale et nous vous renvoyons ici à la lecture du texte de Gaby Keiser-Weber sur le groupe TDAH que vous trouverez dans les pages suivantes.
Ces actions de l’association tendent à préserver le sens du travail du psychologue à l’école.
L’AFPEN va être auditionnée en mars prochain par le défenseur des droits quant à une photographie de la santé mentale des enfants en France et aux ressorts pour mieux prendre soin de ces derniers. Notre expertise est attendue et reconnue. Nous ne manquerons pas lors de cette rencontre, en outre, de pointer la nécessité d’augmenter le nombre de psychologues dans l’institution scolaire pour faciliter l’accueil des enfants et des familles et participer ainsi à l’amélioration de la prévention et au repérage de ce qui fait entrave à un développement s’inscrivant dans les variations de la normale.
Prendre soin de soi est une évidence si l’on veut continuer à être présent à l’autre. Donner du sens à son travail est tout aussi important.
L’AFPEN, dans ses nombreuses actions pour la défense et la promotion de la psychologie à l’École, participe à prendre soin des psychologues de l’Éducation nationale.
Prenez aussi soin de vous, et soutenez l’AFPEN en (re)adhérant.
Laurent Chazelas
Président de l’AFPEN
@laurentchazelas
La lettre complète est envoyée aux adhérents, elle est disponible sur le site adhérent accessible par identifiant et mot de passe.
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