Psychologie & Éducation 2020-3 septembre

Bonjour à tous, 

Ce numéro comme le précédent, L’école à contre temps (1), a été largement alimenté par des écrits des membres du CA : articles, témoignages, participation à la rédaction des conclusions du questionnaire :

« Septembre 2020, drôle de rentrée. Avec le masque, le lavage des mains qui ponctue la journée de classe, la distanciation à ne pas oublier… l’école se remet en mouvement, ralentie pas les protocoles sanitaires. […] Le numéro de juin, L’école à contretemps (1) a proposé une sorte d’état des lieux de la traversée du confinement à travers des témoignages et des articles. « L’école à la maison », les inégalités dans notre société et le rôle de « tiers » du psychologue, en ont été les principaux thèmes.

Ce numéro de septembre, L’école à contretemps (2), se propose de poursuivre la réflexion autour de certains enjeux questionnés par cette période. Le confinement, en instaurant le télétravail, a montré la fonction sociale et communautaire de l’école. Son rôle « instituant » reste aujourd’hui fondamental, dans sa capacité à médiatiser les événements et les tragédies du monde extérieur, grâce à son cadre institutionnel, et aux projets qu’elle engage portés par l’action et la parole des enseignants, des psychologues à leurs côtés, et des autres professionnels… »

Bonne lecture
Le comité de lecture
comite-lecture@afpen.fr
Bulletin d’abonnement sur : www.afpen.fr


Sommaire
 
Marie-Frédérique Bacqué – Apprendre la mort dès l’école
Clotilde Cammal, Christine Désaubry, Fanny Designe, Florence Dubois, Christiane Esposito, Patricia Garouste, Bertrand Pascaud, Monique Poblete, Monique Tixier, Mireille Thibodot – Psychologues EDA et crise sanitaire : analyse d’un questionnaire
Alain Noble –  Le confinement comme expérience de l’épreuve de réalité
Geneviève PÉQUIGNOT –  Soutien ciblé aux équipes par l’approche systémique
Témoignages
Nathalie
– Directrice ; Le jour où j’ai perdu mes élèves
Kheira – Psychologue clinicienne en MECS ;  Ne me quitte pas
Libre- propos
Aline NÉRET – La question de l’urgence pour le psychologue à l’école
Livres et Revues
 
 
 
 
ÉDITORIAL 2020-3
 
Septembre 2020, drôle de rentrée. Avec le masque, le lavage des mains qui ponctue la journée de classe, la distanciation à ne pas oublier… l’école se remet en mouvement, ralentie pas les protocoles sanitaires. Leur objectif de canaliser la propagation du virus semble se doubler d’un autre, plus discret : offrir un exutoire à cette anxiété flottante toujours présente. Pour l’instant, ici et là, des enfants ou des adultes sont écartés, mis en « quatorzaine », quand ils ont été en contact avec des proches porteurs du virus. On est entré dans la période du « vivre avec ». Nous ne savons pas encore dans quelle mesure la crise sanitaire a creusé la fracture scolaire et quelles seront les retombées du travail à distance. Mais à cette rentrée, l’école doit assurer sa mission d’accueil, plus que jamais vitale, en particulier quand le confinement a été une épreuve ou quand la situation économique familiale est devenue très tendue. Souhaitons que la dynamique des retrouvailles entre les élèves et leurs enseignants trouve des appuis sur le lien fort qui s’est noué avec les familles, et s’étende à celles qui se sont isolées.

Le numéro de Psychologie & Éducation de juin 2020 a proposé une sorte d’état des lieux de la traversée du confinement à travers des témoignages et des articles. « L’école à la maison », les inégalités dans notre société et le rôle de « tiers » du psychologue, en ont été les principaux thèmes. Ce numéro de septembre 2020, se propose de poursuivre la réflexion autour de certains enjeux questionnés par cette période. Le confinement, en instaurant le télétravail, a montré la fonction sociale et communautaire de l’école. Son rôle « instituant » reste aujourd’hui fondamental, dans sa capacité à médiatiser les événements et les tragédies du monde extérieur, grâce à son cadre institutionnel, et aux projets qu’elle engage portés par l’action et la parole des enseignants, des psychologues à leurs côtés, et des autres professionnels.
 
L’idée de la mort présente en toile de fond de l’épidémie, a fait effraction dans sa réalité pour de nombreuses familles. Avec une proposition audacieuse, Apprendre la mort à l’école, Marie-Frédérique Bacqué nous invite à faire entrer la mort dans l’école. Il s’agit de s’engager dans une pédagogie de la mort, comme pour d’autres thèmes comme la vie, l’altérité, la citoyenneté… dans une démarche éthique qui ne relève pas de l’acquisition de savoirs mais d’une capacité à se questionner. L’école, lieu où l’enfant fait l’expérience de la séparation et de la perte, a un rôle social à jouer pour désamorcer le déni de la mort, et lui faire perdre « ce caractère de catastrophe absolue à éviter… Cela pourrait faire l’objet d’une réflexion nationale, avec les psychologues souvent sollicités quand un deuil survient.

C’est justement ce qu’évoque Aline Néret, psychologue EDA, dans un Libre-propos : La question de l’urgence pour le psychologue à l’école. La demande d’intervention pressante auprès d’un élève endeuillé témoigne du malaise des professionnels, déstabilisés par la confrontation avec la mort, et enclins à trouver dans l’action immédiate l’apaisement de leur inquiétude. On suit la psychologue qui construit sa réponse, avec le décalage temporel nécessaire au respect de la place et de la parole de chacun. Toute situation de crise rend visible les failles et les limites du système, et apporte des remises en question. C’est ce qui ressort des observations de psychologues sur ce qui s’est passé pour eux pendant le confinement.
 
Qu’en est-il de leur place ? Quel lien les relie à leur institution ? Trois articles écrits par des psychologues EN EDA abordent cette question.
 
Comme annoncé, le groupe de travail du CA de l’AFPEN a rendu compte de l’enquête conduite pendant le confinement : Psychologues EDA et crise sanitaire : analyse d’un questionnaire. Dans ce travail de rédaction remarquable, les auteurs mettent en perspective les données recueillies qu’ils relient, tout en rappelant la disparité des fonctionnements selon les territoires et les secteurs. On saisit les contours de l’identité professionnelle, avec ses points d’appui, le lien avec les familles et les enseignants par exemple, et ses besoins exprimés dans une synthèse très éclairante. Le groupe conclut sur des propositions, notamment sur la nécessité de créer des postes de psychologue coordinateur, intermédiaires entre les praticiens et les différents niveaux de notre système éducatif.

Le confinement comme expérience de l’épreuve de réalité, pour Alain Noble, confirme que la visibilité institutionnelle des psychologues n’est pas assurée sauf à être un « technicien » (dossiers d’orientation ou de maintiens), ce qui occulte la dimension relationnelle de ses missions. Sans un cadrage qui garantit la place de chacun, on est dans un dysfonctionnement. Le psychologue est alors au mieux reconnu pour sa personnalité mais pas pour la fonction qu’il représente, alors qu’il a un rôle à jouer du côté du soutien de la « fonction paternelle » dans l’institution. Ce confinement, temps de réflexion et de créativité a mis en lumière l’intérêt pour le psychologue de s’investir davantage dans le travail institutionnel.

Dans son texte, Soutien ciblé aux équipes par l’approche systémique, Geneviève Péquignot partage et analyse son expérience pendant le confinement. L’approche systémique apporte ici un modèle opérant pour penser la position « méta » du psychologue. L’analyse de ce qui se passe dans l’équipe lui permet de prendre sa place dans le collectif et d’assurer une fonction de contenance. Dans le travail autour des difficultés des élèves, elle s’écarte de l’approche « défectologique » actuelle pour aider l’enseignant à passer « de la plainte à la demande » et construire avec lui des réponses, sans attendre celles proposées « clés en main » à l’extérieur de l’école. Cet article cerne au plus près de la pratique, avec justesse et pertinence, ce qui se passe dans le quotidien du psychologue.
 
Pour terminer ce numéro, suivent deux témoignages choisis parmi ceux recueillis pendant le confinement par le comité de lecture : ils ont en commun d’exprimer quelque chose de l’inconditionnalité du lien.
La lecture du journal de bord du confinement, Le jour où j’ai perdu mes élèves, de Nathalie, directrice d’école, nous emmène dans un tourbillon d’activités au fil des événements qui s’imposent à elle. Les émotions et les tensions la submergent parfois, mais le découragement ne dure jamais. Avec beaucoup de bienveillance et de disponibilité, Nathalie observe, s’ajuste, propose, surmontant les difficultés et les contradictions. Elle reste en lien avec tous. La préparation de la rentrée du 11 mai est un bel exemple de travail d’équipe, avec le souci de refaire « le collectif » pour que chacun s’y retrouve, parle de ses doutes et prenne part à la construction du nouveau cadre de travail.

Avec légèreté et gravité, Kheira psychologue en MECS, raconte son confinement et les liens forts qui se vivent dans l’institution. La Maison, espace de confinement en soi, déborde de vie à l’intérieur quand le monde extérieur s’est figé. Ne me quitte pas est peut-être ce qui unit ces enfants aux parents de qui ils ont été séparés, et aussi aux professionnels, qui de leur côté ont du mal à « couper », comme pris dans une temporalité sans ponctuation.
Le comité de lecture remercie chaleureusement les auteurs qui nous ont confié leur texte pour ce numéro.
 
M. Nonne Barrault
Secrétaire du comité de lecture

 
 
 
 
LIVRES ET REVUES
 
Berger, M. (2019). Sur la violence gratuite en France. Condé en Normandie, L’Artilleur.
Ciccone, A. (2018). Handicap et mort. Toulouse, érès
De Saint Martin, C. (2019). La parole des élèves en situation de handicap. PUG                                                                                                                      
Daure, I. & Reveyrand-Coulon, O. (2019). Le migrant et sa famille. Défis interculturels en psychologie clinique. ESF Sciences Humaines.

Marcelli, D., sous la direction de, avec Lanchon, A., (2019). Les Cafés des parents. Toulouse, Éditions érès.

De Peslouan, D.(2019). Fragments philosophiques et psychologiques autour de l’éducation. Éditions Universitaires Européennes.

Baudrit A. Éducation et formation dans les sociétés contemporaines. Le don/contre don toujours d’actualité ? Presses universitaires de la Méditerranée.

Galle-Tessonneau, M. & Dahéron L. (2020). Les ateliers du praticien : Comprendre et soigner le refus scolaire anxieux. Dunod.
 
 
 
 
 
 
 

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