Psychologie & Éducation 2021-3
Psychologue à l’école, un métier en mouvement
« …Il y a quelques mois, huit psychologues de l’Éducation nationale, de la spécialité EDA (Éducation, Développement et Apprentissage), ont été invités à écrire un article à partir de leur travail universitaire (EPR, écrit professionnel réflexif). Cinq articles ont été publiés (revue 2021-2) et les trois autres le sont dans ce numéro. C’est au sein de leur stage en milieu scolaire qu’ils ont mené des observations et des expérimentations. Ce fut pour eux l’occasion de s’interroger sur le métier de psychologue dans l’école, nouveau champ d’exercice pour la plupart, venus d’autres secteurs comme la santé, le social, le médico-social, etc…»
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Éditorial 2021-3
Septembre 2021, seconde rentrée avec l’épidémie du COVID 19. Depuis plus d’un an, les « vagues » se succèdent, avec chaque fois des contraintes qui viennent perturber et fragiliser nos vies personnelles ou professionnelles. À l’école, les protocoles sanitaires, réajustés régulièrement, sont plus que jamais en vigueur. La période annoncée du « vivre avec » se confirme, avec son lot de drames individuels quand un proche est touché. Continuer, assurer sa mission en maintenant notre cap professionnel est ce que nous pouvons faire, et c’est plus que jamais fondamental.
Pour ce numéro 2021-3 de Psychologie & Éducation, nous poursuivons la réflexion sur le métier de psychologue dans le champ scolaire avec deux grandes parties. La première, tournée vers la pratique professionnelle, termine la série d’articles proposés par des psychologues EN EDA précédemment. La seconde rend compte de deux recherches en psychologie du développement : sur la construction de la temporalité et ses aléas souvent ignorés, et sur les apports du dessin de la famille imaginée dans un contexte interculturel.
Il y a quelques mois, huit psychologues de l’Éducation nationale, de la spécialité EDA (Éducation, Développement et Apprentissage), ont été invités à écrire un article à partir de leur travail universitaire (EPR, écrit professionnel réflexif). Cinq articles ont été publiés (revue 2021-2) et les trois autres le sont dans ce numéro. C’est au sein de leur stage en milieu scolaire qu’ils ont mené des observations et des expérimentations. Ce fut pour eux l’occasion de s’interroger sur le métier de psychologue dans l’école, nouveau champ d’exercice pour la plupart, venus d’autres secteurs comme la santé, le social, le médico-social, etc.
Cet ensemble d’articles pose des questions essentielles et très actuelles sur notre rôle auprès des équipes, sur l’évolution du métier d’enseignant et sur l’inclusion scolaire. Le fil conducteur de ces écrits est le positionnement du psychologue dans son exercice. Ce signifiant amène avec lui l’idée d’un mouvement, d’une dynamique. Il exprime comment, à travers des situations très diverses, le psychologue est en observation et à l’écoute, et comment il s’ajuste au fil des rencontres et des sollicitations qui lui sont adressées. Le psychologue reformule, met en forme, dégage le sens de ce qui se passe et le partage avec ses partenaires. Dans ses interventions, il est pris dans des tensions et doit composer entre le cadre institutionnel et la réalité des demandes. Dans les articles, ce questionnement général autour du positionnement et du rôle du psychologue s’articule à des thèmes plus précis qui partent de la clinique, institutionnelle ou plus individuelle.
Dans le numéro 2021-2 de juin dernier[1], plusieurs thèmes étaient abordés : La complexité des relations entre l’école et les différents partenaires dans le suivi d’un élève « à besoins particuliers » en grande souffrance – Les processus en jeu dans le travail d’orientation à l’école élémentaire – Les fondements de la « demande » qui vient lier l’engagement entre le psychologue et convoquer un « malentendu » entre pédagogie et psychologie – Le décrochage scolaire quand il apparaît très tôt dans la vie de l’élève, et les réponses préventives possibles – La souffrance au travail pour les enseignants et l’intervention du psychologue, face au mal-être des adultes.
Dans ce numéro de septembre 2021, trois articles prennent la suite.
Le positionnement du psychologue de l’Éducation nationale au sein des équipes enseignantes
Pris dans « un faisceau d’intérêts, parfois contradictoires », comment le psychologue peut-il garder sa place de personne ressource, avec l’enfant au centre du travail ? Pour Mélanie Sulmona Cossu cela passe par la connaissance, et la reconnaissance, de la complexité de la tâche des enseignants. Cela passe aussi par la compréhension des enjeux des représentations de la difficulté qui s’imbriquent dans les demandes. Le psychologue travaille dans un « jeu de va et vient » et conjugue la proximité professionnelle qui permet une écoute, et la distance nécessaire avec l’équipe. Il est dans un rôle de « faisant lien, sans « faire corps ». L’article se conclut sur une belle idée : la compréhension de ce qui organise la demande de l’école constitue un prérequis pour le travail du psychologue qui permet de partager la responsabilité des difficultés des enfants.
Accompagner la réflexion autour des aménagements pour élèves à besoins particuliers.
Géraldine Granié aborde la question du rôle du psychologue auprès des enseignants mis à mal par les contraintes de l’institution au regard des « besoins particuliers » de certains élèves. Comment « faire » l’école inclusive quand la différenciation pédagogique ne suffit pas ? Elle expose une expérience menée avec les équipes de deux écoles maternelles à propos de l’utilisation d’objets comme supports de communication. Ces objets, venus du champ thérapeutique, fonctionnent dans la classe comme « outils » de médiation dans la mesure où ils sont investis d’un sens qui sécurise l’élève et lui donne accès à l’espace de la classe. Le travail commun permet à l’enseignant de se décaler et de penser l’enfant, très éloigné des attendus scolaires, comme un élève. L’inclusion nécessite de différencier trouble et besoins, et de passer du « pourquoi l’enfant n’apprend pas » à « comment il fonctionne face aux apprentissages ».
L’auto-divulgation du psychologue de l’Éducation nationale en situation d’entretien avec les parents : une pratique possible ?
À partir d’une situation clinique, Jordi Drets développe sa réflexion à propos de l’« auto-divulgation ». Le récit du déroulement des rencontres avec la mère de Marc nous fait vivre les mouvements qui traversent l’entretien et auxquels le psychologue s’ajuste. À un moment, celui-ci livre des éléments personnels, dans une auto-divulgation qui vient rompre un discours enkysté et relance l’échange. Comment utiliser ce changement de position pour que cela fonctionne comme une transition sans faire une rupture du cadre ? L’auteur explore les tenants et aboutissants de cette pratique, avec au centre la question de la distance. Il nous renvoie à ce que dans d’autres approches, on nomme transfert ou contretransfert, pour désigner ce qui se passe au plan psychique, en partie à un niveau inconscient, entre le psychologue et son patient. Cet article vivant et dynamique articule cas clinique et théorie, et nous autorise à innover.
Prêter attention au développement des notions temporelles chez les 6/11ans
Jean-Luc Pilet attire notre attention sur l’importance de l’appréhension de la temporalité, pilier dans la construction de l’identité. Il part d’une recherche sur des jeunes en réinsertion pour lesquels le rapport au temps a joué un rôle dans les ruptures de leur parcours chaotique, et auxquels un programme de remédiation a été proposé. Il va ensuite questionner ce qui a fait défaut pendant l’enfance. L’auteur partage son expérience de clinicien et de chercheur avec une démarche tout à fait intéressante d’observations à l’âge adulte qu’il met en perspective dans le registre de l’enfance. À l’école, les professionnels sont souvent confrontés à la question des repères temporels et ne les identifient pas toujours avec clairvoyance. L’auteur reprend la notion de temps dans le développement et invite les professionnels à porter leur attention à leur repérage et à leur remédiation dans la perspective de prévention.
Pertinence du dessin de la famille dans l’évaluation du processus d’intégration : études de dessins d’élèves originaires de Turquie en France
Dans le cadre de travaux sur l’intégration des communautés originaires de Turquie en France, Yaël Blic et Jean-Charles Houillon ont mené une recherche qui porte sur l’utilisation du dessin de famille, plus précisément sur l’intérêt du dessin de la « famille imaginée » comme outil de représentation culturelle et familiale de l’enfant. La consigne est choisie en accord avec les nouvelles configurations familiales et pour permettre l’expression des particularités culturelles. Cette étude, auprès d’enfants issus de la communauté turque, met en perspective la part de l’influence de la culture « collectiviste » du milieu familial et celle de la culture « individualiste » de l’école française. Les résultats montrent que l’enfant d’origine turque articule les deux modèles : dans sa représentation de lui-même et de sa famille, il « conjugue l’assimilation des normes dominantes de la société d’accueil dans les contextes institutionnels tout en maintenant les normes culturelles d’origine dans la sphère privée ».
Le comité de lecture remercie très chaleureusement les auteurs des articles.
Martine Nonne Barrault
Secrétaire du comité de lecture
Livres et Revues
Coum, D. Sous la direction de (2021). Pertes, ruptures et séparations dans les liens familiaux. Quelles épreuves, quels changements, quelles inventions ? Éditions ÉRÈS.
Mesmin, C. (2021). Reconnaissance de la psychologie. Les routes de la soie – Éditions.
MOREAU Sophie (2020). Œil pour œil, clan pour clan. Toulouse, Erès
Plastow, MG. (2021). Sabina Spielrein, poésie et vérité. Villematier, Eres.
Dollé-Monglond Brigitte, La thérapie familiale à l’heure de la singularité des couples et des familles. (2021), ESF et T.F.
Lebrun, J-P. & Eraly, A. (2021). Réinventer l’autorité, psychanalyse et sociologie. Humus entretiens, ÉRÈS
[1] Revue Psychologie & Éducation – Psychologue à l’école : découverte et questionnements. 2021-2 – juin 2021
1 Response
Je voudrais proposer un article. C’est pourquoi, je demande de m’envoyer les conditions à remplir pour la publication. Me transférer par mon adresse mail.