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Psychologie & Éducation 2018-2, juin 2018.
Situations de crise en milieu scolaire : place du psychologue dans les dispositifs.

Chers adhérents,
La revue Psychologie & Éducation est un outil précieux qui répond à nos besoins de formation et à nos préoccupations de terrain. Elle explore les méandres de notre métier pour nous aider à penser notre travail. C’est à cette ambition que ce numéro thématique de Psychologie & Éducation veut répondre en interrogeant la place du psychologue dans les dispositifs d’accompagnement des « situations de crises » à l’école.
Après le sommaire et une introduction qui explique l’origine de ce numéro, vous pourrez lire l’éditorial et la liste des ouvrages de la rubrique « Livres & Revues ».
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Très bonne lecture !
Le comité de lecture


SOMMAIRE

Dominique BERTELOOT – Rôle des psychologues de l’Éducation nationale dans la gestion des crises.

Hélène ROMANO – À l’école de la perte

Marie-Claude EGRY – L’enfant face au deuil

Véronique LE MEZEC – Situations de crises psycho traumatiques en milieu scolaire – Place des psychologues du système éducatif

Christophe LUXEMBOURGER & Youssef TAZOUTI – Qu’en est-il de la formation à l’intervention en situation de crise psychotraumatique en milieu scolaire en 2017-2018 ? Enquête auprès des psychologues de l’Education nationale

Jean-Luc PILET & Catherine GUIHARD – Création d’un protocole de gestion de crise adapté au milieu scolaire

Jean-Luc DANIEL & Alain NOBLE – Un dispositif d’accompagnement dans les écoles primaires : place et rôle du psychologue dans les cellules d’écoute

Introduction

La FFPP et l’ANPEC, dans le cadre de la commission éducation FFPP et du lien d’affiliation de l’ANPEC à la FFPP, ont souhaité élaborer une journée de formation pour les psychologues quant à l’impact d’une situation de crise survenant en milieu scolaire, et à la place et aux fonctions que les psychologues pouvaient y tenir. L’AFPEN a pris part à la co-élaboration de cette journée, du fait de ses liens proches avec l’ANPEC, toutes deux adhérentes à l’ISPA et accédant aux formations européennes agréées ESPCT. Les liens qui existent entre la FFPP et l’AFPEN se sont enrichis ces dernières années en particulier pour la représentation européenne des psychologues de l’Éducation au sein de l’EFPA assurée par une administratrice de l’AFPEN.
Cette journée de formation s’est déroulée le 20 mai 2017, salle de la Bourse du Travail à Paris.
Situations de crises psycho traumatiques en milieu scolaire.
Comment se préparer ? Comment faire face ? Quels dispositifs d’accompagnement ?
Le numéro spécial, 2018-2 de Psychologie & Éducation en représente le prolongement. Il reprend quelques-unes des présentations de cette journée, complétées par d’autres écrits qui prennent naturellement leur place autour de la thématique. Que tous les auteurs soient ici chaleureusement remerciés.
L’époque actuelle met à rude épreuve nos sociétés laïques et démocratiques. Nous souhaitons que ces textes alimentent la réflexion et la pratique des psychologues et qu’ils soient un apport précieux dans ces moments de rencontre avec le réel de la mort.
Claire Messager, présidente de l’ANPEC de 2012 à 2017
Benoît Schneider, coprésident de la FFPP
Laurent Chazelas, président de l’AFPEN.
Fédération Française des Psychologues et de la Psychologie, FFPP
Association Nationale des Psychologues de l’Enseignement Catholique, ANPEC
Association Française des Psychologues de l’Éducation Nationale, AFPEN
International School Psychology Association, ISPA
European School Psychology Centre for Training, ESPCT
European Federation of Psychologists Associations, EFPA

Éditorial

Les articles de ce numéro thématique 2018-2 de Psychologie & Éducation proposent d’explorer différents aspects de la place et du rôle du psychologue dans les dispositifs mis en place par l’Éducation nationale pour faire face aux situations de crise psychotraumatiques survenant dans les écoles : Comment se préparer ? Comment faire face ? Quels dispositifs d’accompagnement?
Il s’agit ici des situations graves qui, comme le définissent les référentiels de l’Éducation nationale, ont un impact sur la communauté scolaire. La crise psychotraumatique survient après un événement soudain et violent, dans l’institution ou son environnement proche : décès, agressions, accident, catastrophes naturelles, tentatives de suicide etc. Le lecteur pourra se reporter à l’article, Situations de crise en milieu scolaire : ce qu’en disent les psychologues, numéro 2013-3 de Psychologie & Éducation qui apporte des définitions approfondies de ces notions.
L’évaluation de ce qui se passe est une première étape essentielle, en particulier pour déterminer s’il y a nécessité à mobiliser le protocole du département ou s’il s’agit d’une situation très difficile, à résoudre avec les moyens habituels de régulation de l’institution. La prise en charge sera différente en fonction des facteurs qui vont caractériser la situation dans ses effets de rupture sur le fonctionnement institutionnel et sur les personnes.
Les protocoles mis en place dans les académies à partir des années 2000, insistent sur cette évaluation et sur l’importance d’une coordination inter professionnelle qui a pris le pas sur le caractère de « l’urgence » très marqué dans les débuts. Ni recette, ni mode d’emploi, le protocole est un outil qui permet de construire un dispositif adapté à chaque situation, un cadre qui permet de dégager des espaces de réflexion pour les professionnels, et d’accueil et d’écoute pour les personnes. Enfin, la question de la formation est dans toutes les préoccupations.

De sa place de Délégué ministériel chargé de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire, Dominique Berteloot met en perspective les réactions aux drames qui ont jalonné la vie des établissements scolaires depuis les années 70. En dehors des crises, « passages obligés de l’existence », l’auteur distingue les « crises silencieuses, les tensions discrètes et les crises majeures ». Le psychologue a sa place dans les dispositifs, mais il est d’abord un acteur chargé d’une mission de vigilance pour une prévention des « ruptures et tensions de la vie ordinaire » ; c’est un « lanceur d’alerte ». Repérer les signes d’une « crise silencieuse » est « au cœur des missions des psychologues », vers les enfants et vers les adultes dans leur rôle de protection.

L’événement traumatique passe par un face à face avec la mort et fige le temps de chaque sujet comme de l’institution. Le propos d’Hélène Romano est une mise au point contre les dérives de la « psychologisation » et la « psychiatrisation » des événements dits traumatiques. Elle dénonce les confusions entre les événements difficiles, la perte et le deuil, et le traumatisme psychique, blessure à prendre en charge. Elle dénonce la multiplication des « cellules », le « forçage » de parole qui entraîne une survictimisation aux effets délétères. Le psychologue « a une fonction de pare-excitation dans les moments où les capacités élaboratives individuelles, inter-individuelles, groupales et institutionnelles sont mises à mal ». Il réintroduit la temporalité et accompagne l’équipe à penser ce qui se passe, avec une vigilance aux signes de déliaisons institutionnelles.

Pour Marie-Claude Egry, la clinique du deuil chez l’enfant laisse les professionnels dans un sentiment d’impuissance face à la mort qui surgit dans le réel : difficile de concevoir comment l’enfant traverse la perte d’un proche, et difficile de répondre à la demande sociale de traiter un tel deuil dans l’immédiateté. À partir de vignettes cliniques, l’auteure développe différents thèmes attenants à la clinique du deuil chez l’enfant : la perte du sentiment de sécurité et la réactivation de l’angoisse de séparation, le drame du fantasme réalisé dans sa collusion avec la réalité, la superposition de son deuil, de celui des survivants, et des ruptures de l’histoire familiale, etc. Dans une approche clinique, en dehors des modèles qui exigent une expression cathartique de la douleur et enferment l’enfant dans une compréhension préétablie, le psychologue ouvre un espace pour retrouver la confiance, et rétablir une sécurité affective et la continuité d’être.

Véronique Le Mézec décrit de façon très précise la place et le rôle du psychologue dans l’institution scolaire dans les différents moments qui caractérisent les situations de crises. Rapportés au code de déontologie de la profession, les repères sont présentés à chaque étape avec leurs limites. Elle aborde ensuite la question de la formation sur la clinique du stress et du trauma, la construction de réseaux inter professionnels et la connaissance des protocoles de son département. Le psychologue a une place « tiers-inclus » dans l’institution. Son rôle est majeur dans le travail d’analyse de la situation et d’ajustement de la démarche à la nature de l’évènement et à l’âge des enfants.

Suite à une enquête de 2004 qui montrait déjà une forte demande de formation, les auteurs, Christophe Luxembourger et Youssef Tazouti, ont proposé un nouveau questionnaire aux psychologues en poste du premier et du second degré, et aux psychologues en formation. La forte participation à cette enquête a confirmé la demande de formation et de réflexion. Les demandes concernent l’appropriation des protocoles d’intervention et la clinique du trauma à moyen et long terme, la spécificité de l’écoute et de l’accompagnement individuel et collectif, etc.

Catherine Guihard et Jean Luc Pilet relatent la création d’un protocole d’intervention en situation de crise en milieu scolaire étape par étape. Le travail de recherche action a été conduit sur plusieurs années, avec des allers-retours entre théorie et terrain, et une réflexion sur les questions déontologiques. On saisit ainsi l’importance de ce qui apparaît maintenant comme les fondamentaux de la gestion de crise : l’évaluation initiale et la construction d’un schéma de travail, la juste place de chacun dans le partenariat professionnel et le respect de celle des autres. Le psychologue se positionne de façon plus active et engagée.

Jean-Luc Daniel et Alain Noble apportent une contribution originale à la réflexion sur la prise en charge des situations de crise à l’école. Ils décrivent et analysent un dispositif créé dans leur département qui permet la mobilisation et la réflexion en interne avant de recourir si nécessaire à la cellule académique ou à la CUMP. La mise au travail de tous, par la parole et la pensée, met des écarts entre les ressentis et les représentations, et amène des effets sur le groupe et sur son fonctionnement. La situation clinique exposée ensuite est doublement percutante : en tant qu’événement grave ayant un impact fort sur la communauté scolaire et dans ce qu’elle montre de ces situations, quand les enseignants vont mal et qu’il y a maltraitance à l’école.

Livres & Revues

TIMMERMANS-DELWART J., BLOMART J. (2017). Pratiquer la Concertation restaurative en groupe avec des jeunes. Editions Chroniques sociales, Lyon. Collection Savoir communiquer.

YALOM, I. (2017). Thérapie existentielle. Essai traduit de l’anglais (États-Unis) par Laurence Richard. Librairie générale française, collection le livre de poche.

ROMANO, H. (2011. 2e édition). Dis, c’est comment quand on est mort ? Accompagner l’enfant sur le chemin du chagrin. Editions de La pensée sauvage. Collection Trauma. (1ère édition, 2009).

BOURDEAUT, O. (2015). En attendant Bojangles. Editions Finitude, le Bouscat.

CAZENEUVE, M. (2018). Journal d’un psychologue de l’école de la république. Expérience dans un quartier dit « sensible ». L’Harmattan.

BALLAND, O. (2013). Ma famille c’est Maman et moi – Histoire d’une adoption monoparentale. auto édition. Illustrations de CT an’infographie.

CROIX, L. & POMMIER, G., (2018). Pour un regard neuf de la Psychanalyse sur le genre et les parentalités. Point hors ligne, Érès.

PILET, J-L., GUIHARD C., OBRINGER, A. & BRICE, D. (2015). Intervenir en situation de violence. Du choc à la réponse adaptée. Lyon, Chronique Sociale.

ZAGURY, D. & ASSOULINE, F. (2010). L’énigme des tueurs en série. Editions Pocket.

Le Comité de lecture de l’AFPEN